Apprendre en s'amusant, le nouvel enjeu pédagogique de PSE :

Apprendre en s'amusant, le nouvel enjeu pédagogique de PSE

Une jeune de PSE en classe avec un krama sur la tête

Découvrez comment PSE met la pédagogie au coeur de ses programmes d'éducation. 

Pour ceux qui ne le savent pas encore, PSE est une école qui sort de l'ordinaire... On s'y rend pour étudier mais aussi pour manger, se faire soigner si nécessaire, jouer et se faire des amis. En bref, on s'y rend pour s'épanouir et mieux grandir. L'éducation est donc au coeur de tous les programmes de l'association. 

Le développement de chaque enfant est la priorité de l'association et a commencé avec les fondateurs, Christian et Marie-France des Pallières, dès le début de leurs actions au Cambodge il y a près de 25 ans. Ainsi, il en va du devoir de tous, professeurs, employés et volontaires, de transmettre le meilleur de soi aux enfants et jeunes adultes qui viennent tous les jours à PSE. Cependant, une équipe semble savoir mieux le faire que les autres. C'est l'équipe d'Emilie, la responsable pédagogique de PSE. 

Les soft skills : nouvelle matière, nouvelle pédagogie

Arrivée il y a tout juste un an, Emilie veut faire bouger les choses. Spécialisée dans le coaching, elle s'y connait en communication, stratégies comportementales et en développement personnel. Ces connaissances lui permettent d'apporter de nouvelles idées pour faire évoluer la pédagogie à PSE. « Ma mission c'est que les enfants aient le sourire en classe » dit-elle quand on lui demande de décrire son métier. Pour cela, elle a créé une nouvelle équipe pédagogique dont l'objectif est de développer les soft skills (compétences comportementales) à tous les niveaux scolaires. 

Difficile à traduire en français, notre spécialiste définit le terme soft skills ainsi : « C'est ce qu'on n'apprend pas en classet mais qui construit un futur adulte : apprendre à communiquer, à avoir confiance en soi, savoir travailler en équipe, parler en public... ». En bref, les soft skills ont pour objectif d'aider chaque étudiant à se construire, à connaître sa valeur et son importance dans la société, et à lui transmettre des notions qui lui permettront d'agir pour les futures générations. 

Des étudiants en salle de classe, regardant une présentation

La mise en place de cette matière est partie d'un constat fait sur l'héritage de la pédagogie au Cambodge. Pour bien comprendre le système pédagogique actuel, il faut revenir plusieurs siècles en arrière, dans les écoles bouddhistes où l'apprentissage était basé sur la répétition. Plus récemment dans l'histoire du pays, on peut faire le rapprochement avec les méthodes d'endoctrinement des khmers rouges également basées sur la répétition et qui a beaucoup marqué sa génération. « A l'époque, on pensait que la meilleure méthode d'apprentissage était la répétition. Plus on répétait, plus on retenait. Et la pédagogie dans les écoles fonctionne toujours de cette manière » explique Emilie. « Avec les soft skills, j'essaie de montrer aux élèves mais aussi aux professeurs que l'apprentissage peut être ludique, facile et attrayant ». La tâche n'est pas facile et les résultats commencent doucement à se faire sentir. « Je sais que la mise en place de cette pédagogie et sa répercussion sur les élèves prendra du temps, on ne peut pas demander à un enfant de changer en l'espace de quelques mois » avoue la jeune femme, pleine d'espoir. 

L'équipe responsable des soft skills est composée de 12 employés : des professeurs, des psychologues, des anciens formateurs. « Ils sont presque tous nouveaux » dit Emilie, « sauf Chenda et Sopheap, qui sont des anciens professeurs de PSE. Sopheap est même l'enseignante la plus ancienne de notre école ! ». Emilie a tenu à recruter des personnes spécialisées dans ce domaine « parce qu'avant c'était uniquement les professeurs qui donnaient les cours de morale mais leur enseignement était très scolaire, et mon objectif est d'inverser cela » poursuit-elle. Un objectif largement atteint grâce aux méthodes appliquées pendant les cours. Pendant une semaine, une de nos volontaires s'est rendue dans les salles de classe pour mieux comprendre ce nouvel enseignement qui fait déjà sensation chez les élèves. 

Un étudiant et son professeur en train de faire un exercice

Une semaine pour mieux comprendre

Les cours de soft skills ont lieu deux heures par semaines pour tous les élèves du CP au Bachelor (Bac+3). Chaque enseignement est adapté aux besoins et au niveau des élèves. 

Pour bien comprendre les méthodes des professeurs et les comportements des étudiants, il est important de garder en tête que les enfants qui arrivent à PSE ont grandi dans des conditions très difficiles. La plupart d'entre eux sont témoins de violence, d'abus et grandissent seuls sans cadre imposé. « Imaginez-vous ces gamins des rues qui arrivent à PSE et doivent pour la première fois dans leur vie respecter des horaires, porter un uniforme, être polis et respectueux envers les gens qui les entourent. C'est parfois difficile et nous devons les aider ». Jusqu'à l'apparition des soft skills, un enseignement humain était déjà donné mais celui-ci avait une fonction plus moralisatrice avec des enseignements très théoriques. Depuis les changements apportés par l'équipe d'Emilie, les cours se déroulent de manière variée : jeux, exercices de travail en équipe, participation active des élèves...

Pendant sa semaine en immersion, notre volontaire est accueillie par Saream, professeur dans une classe de 4ème et par Somethea, professeur pour les élèves en deuxième année à l'Ecole d'Hôtellerie et Tourisme. Les objectifs spécifiques des deux cours auxquels elle assiste sont évidemment très différents : « Avec les plus jeunes, il faut savoir être flexible ». 

Pour être disposés à écouter, les enfants commencent par 10 minutes de méditation, un moment calme et silencieux, chose rare dans leur vie agitée. La leçon commence ensuite par un récapitulatif des enseignements appris au cours précédent. La prise de parole est libre et les élèves semblent heureux de participer et de montrer aux autres qu'ils ont bien tout compris. Saream leur demande ensuite de faire des petits groupes et lancent un jeu en compétition dont le but est de réfléchir en équipe. Les règles sont simples : le professeur pose une question, la première équipe qui trouve la réponse crie "STOP", et l'équipe qui trouve le plus de bonnes réponses gagne.

La compétitivité est un point fort des cambodgiens et tous sont prêts à gagner le gros lot. Grâce à cette technique, les professeurs arrivent à capter l'attention des étudiants dès les premières minutes et à transmettre les connaissances aux élèves de façon amusante et active. 

Somethea utilise la même technique avec ses élèves de l'Ecole d'Hôtellerie et de Tourisme. Il n'y a pas d'âge pour s'amuser ! Pour eux, les jeux proposés ont pour objectif de les former à des solutions simples de management. « Les jeux de la séance ont pour but de vous former à trouver des solutions rapidement dans des situations de crise » explique le professeur. Une compétence en effet indispensable pour des jeunes qui s'apprêtent à faire leurs premiers pas dans l'industrie hôtelière. Deux jeux sont au programme : un jeu de rapidité en équipe et un jeu de réflexion. A la fin, Somethea prend le temps de demander aux élèves ce qu'ils ont appris. Chacun son tour dit ce qu'il a ressenti pendant les jeux « travail d'équipe », « créativité », « réfléchir rapidement »... Tous ont leur mot à dire et leur capacité d'analyse est impressionnante. Ils ne sont pas du tout timides et ne se jugent pas entre eux pendant les activités, des qualités qui permettent à tous de participer sans être gêné. A la fin du cours, le professeur explique que la leçon a servi à devenir proactif. « Je veux vous montrer que vous êtes capable de trouver une solution par vous-même. En entreprise, on vous demandera de savoir gérer des situations et de prendre des décisions sans qu'on ait à vous le demander ». 

Le monde de l'entreprise, Somethea le connait bien. Avant de se reconvertir, il travaillait dans l'équipe marketing d'une grosse entreprise cambodgienne. Quant à Saream, il a suivi un master en philosophie à Phnom Penh avant de devenir professeur à PSE. Toute l'équipe donne son maximum pour les élèves. « Je suis professeur mais je travaille également avec Emilie pour faire avancer la pédagogie. C'est indispensable pour nos élèves » dit Somethea à l'intercours. Et d'ailleurs, les élèves le leur rendent bien. Meta, 12 ans, partage son ressenti : « j'aime bien le cours de monsieur Saream parce que c'est sympa, on fait des jeux et en même temps on apprend des choses. Ça change de nos cours habituels ». Les cours sont d'ailleurs très joyeux et on observe une belle proximité entre élèves et professeurs. Le cours se termine sur une note d'humour : l'équipe qui a récolté le moins de points est soumise à une épreuve de danse ou de chant, pour le plus grand bonheur de leurs camarades ! 

Répondre aux enjeux actuels

L'environnement est aujourd'hui une problématique majeure au Cambodge. Ceux qui ont déjà visité le pays peuvent en témoigner. A PSE, tout le monde essaie de faire au mieux pour éviter le plastique, le gaspillage alimentaire est interdit et les élèves reçoivent des cours pour comprendre l'utilité des actions écologiques. Ces cours sont assurés par de jeunes professeurs spécialisés dans le domaine. 

Pendant sa semaine de découverte, notre volontaire a fait la rencontre de Sophary, une jeune professeure de PSE. Dynamique et proche des étudiants, son objectif est « d'encourager les élèves à s'intéresser aux problématiques environnementales et à leur faire appliquer ce qu'ils apprennent dans leur vie quotidienne ». La mise en application du cours sur l'environnement est primordiale et même si la mission est difficile, elle commence à porter ses fruits selon les observations d'Emilie. « Nous avons de plus en plus de jeunes qui participent à des journées de nettoyage des rues et ils sont toujours intéressés par les événements organisés par notre équipe ». 

Une gourde réutilisable sur la table d'un étudiant

Intégrés à la pédagogie des soft skills, les cours sur l'environnement sont récents et devraient continuer de se développer dans les années à suivre.

Emilie a également pour projet de donner des cours d'éducation sexuel. « Ce n'est pas facile au Cambodge parce que c'est une société très pudique ». Cependant, les enfants y sont déjà sensibilisés et des gynécologues sont employés à PSE pour les jeunes qui en ont besoin. Toutefois, l'équipe pédagogique voudrait appliquer les méthodes d'enseignement des cours de soft skills aux cours d'éducation sexuelle. « Normalement, nous devrions avoir la mise en place de nouveaux projets plus adapté au public et à la génération à laquelle nous faisons face. Cela devrait permettre de libérer le dialogue et d'intéresser les étudiants ».

Les méthodes d'Emilie semblent séduire les autres écoles. Notre équipe pédagogique travaille actuellement avec le Ministère de l'Education pour appliquer la pédagogie de PSE dans toutes les écoles publiques cambodgiennes.