De la passion à une profession : rencontre avec Fernando, responsable du programme Entre Deux :

De la passion à une profession : rencontre avec Fernando, responsable du programme Entre Deux

Portrait de Fernando, responsable du programme Entre-Deux

Touché par l'action de PSE, Fernando est passé de moniteur des camps PSE à responsable du programme Entre Deux, créé pour lutter contre le décrochage scolaire.

D'une passion à un métier

Fernando Restoy a découvert PSE en 2014, grâce aux camps PSE. C'était il y a 9 ans, mais Fernando n'a jamais cessé de s'engager à Pour un Sourire d'Enfant. « J'ai eu un coup de foudre pour l'association, le pays et les enfants en 2014. Depuis, je n'ai pas cessé de revenir pour les camps PSE. Je suis passé de moniteur à coordinateur puis superviseur, et à chaque fois que je revenais en Espagne, j'avais l'impression d'avoir laissé mon esprit là-bas, au Cambodge, avec tous ces beaux sourires » explique le jeune homme. « J'avais la tête pleine de souvenirs. Et puis, j'ai eu l'impression que je ne pouvais pas être aussi heureux chez moi que je l'avais été pendant ces mois passés au Cambodge. J'ai donc commencé à réfléchir à ma vie : ce n'était pas très sain de savoir où se trouvait mon bonheur mais de le contempler depuis l'Espagne pendant les 11 autres mois de l'année. J'étais sûr de vouuloir travailler avec les enfants, mais je ne savais pas comment, jusqu'à ce que je découvre à quel point il est important de développer des compétences non techniques pour devenir une meilleure version de nous-mêmes. C'est alors que j'ai décidé de partir aux Etats-Unis pour apprendre à développer chez les autres des compétences essentielles, telles que la confiance en soi, la gestion de soi, l'empathie ou la résolution des conflits. Après ça, j'ai emmenagé à Phnom Penh pour relancer le programme Entre-Deux à Pour un Sourire d'Enfant. »

Fernando, lors des camps PSE avec une petite fille prise en charge par PSE
Fernando entouré d'enfants lors des camps PSE

Partir de zéro et atteindre un taux de réussite de 80%

Aujourd'hui, Fernando a 29 ans et peut être fier de ce qu'il a accompli à PSE. Après avoir pris la décision de venir y travailler en février 2023, Fernando a été confronté à un défi majeur : le décrochage scolaire des jeunes âgés de 12 à 19 ans, dont 83% de garçons. Comment motiver ces élèves à poursuivre leur scolarité afin qu'ils puissent trouver un bon emploi plus tard ? 

L'objectif principal du programme est de réduire le décrochage scolaire en aidant les élèves à augmenter leur motivation à aller à l'école, améliorer leurs résultats scolaires et leurs habitudes, empêcher les élèves de devenir des élèves à haut risque de décrochage. « Convaincre les élèves de ne pas quitter l'école, observer et rechercher ce dont les enfants ont besoin et y répondre d'une manière saine » complète Fernando. « Notre mission est de réduire le décrochage scolaire en donnant aux élèves beaucoup d'amour et beaucoup de temps. Nous essayons de les aider à prendre confiance en eux, mais aussi en nous, en leurs enseignants, en leurs éducateurs et en PSE ! »

Pour y parvenir, l'équipe met en place les actions suivantes : 

  • Accueillir les élèves avec attention à l'entrée, diffuser une musique calme pendant les activités quotidiennes, partager ses sentiments avant de commencer la journée et éviter le jugements, les punitions et les cris lors des interactions ;
  • Jouer avec les élèves pendant les premiers jours du programme, déjeuner ensemble, se rapprocher émotionnellement des autres lorsqu'on se sent contrarié, stressé ou effrayé ;
  • Demander aux élèves de passer des tests de personnalité afin de comprendre leurs talents et les mettre en relation avec des emplois futurs, tout en leur apprenant la responsabilité personnelle ;
  • Inviter les parents des élèves à participer à des activités qui permettent aux élèves et aux parents de réflélchir à leur situation personnelle et de se rapprochere émotionnellement les uns des autres ;
  • Faire faire aux élèves des exercices conçus pour comprendre l'origine de leurs sentiments de malaise, dans le but de trouver des solutions pour changer ce qu'ils ressentent ;
  • Encourager les étudiants à penser par eux mêmes et les aider à trouver des solutions saines à leurs problèmes, à travers des réfléxions ouvertes ou des conversations personnelles. 

Aujourd'hui, Entre- Deux propose deux programmes différents. Un d'une semaine pour les élèves qui risquent fortement d'abonner PSE, et un autre de deux semaines pour ceux qui risquent d'être renvoyés pour mauvais comportement. Ils sont encadrés par Fernando et Sokunthea, qui sont fiers de dire qu'aujourd'hui, 80% des enfants qui sont passés par le programme Entre-Deux sont de retour à l'école. PSE s'assure que les 20% d'élèves qui ne poursuivent pas leurs études soient bien pris en charge par d'autres ONG ou écoles. 

Fernando entouré d'élèves pris en charge dans le programme Entre-Deux

Un travail réussi, mais non sans difficultés et défis

L'une des principales difficultés rencontrées par Fernando à son arrivée était la langue. En effet, pendant les quatre premiers mois, il était seul dans le programme. Il était donc difficile pour lui de se faire comprendre et d'expliquer sa vision du programme alors qu'il ne parlait pas couramment le khmer. Cependant, Fernando est reconnaissant de l'aide considérable qu'il a reçue des autres membres de l'équipe de PSE. Et dès que son collègue est arrivé dans le programme, les choses ont été plus faciles pour lui. 

L'autre défi majeur était la mission elle-même : travailler avec des élèves qui ne veulent pas continuer à aller à l'école. En effet, le décrochage scolaire a toujours existé dans les familles pauvres mais depuis la pandémie de la Covid-19, la situation s'est aggravée. En effet, la situation financière rend les familles très vulnérables et les obligent à pousser leurs enfants à travailler et à trouver de l'argent partout où ils le peuvent.

Focus sur deux jeunes qui ont bénéficié du programme Entre-Deux

« Rith est un gentil garçon qui manquait très souvent l'école » explique Fernando. « Depuis qu'il est pris en charge dans le programme Entre-Deux, nous avons pu observer qu'il est intelligent et serviable, mais aussi profondément blessé par sa situation à la maison. Nous pensons que sa personnalité et son comportement sont influencés par sa relation avec sa famille. Il nous a expliqué détester être à la maison parce que sa famille, et en particulier sa mère, le frappait tous les jours, le jugeait pour "tout" ce qu'il faisait, lui donnait trop de responsabilités et le contrôlait trop. Le jeune garçon a également parler de se suicider parce qu'il ne se sentait pas aimé ni pris en compte dans sa famille. Nous avons alors organisé un atelier avec la mère de Rith pour qu'ils puissent s'écouter et comprendre les besoins de chacun. A la fin de l'activité, ils ont créé des règles de vie pour que chacun se sente respecté et aimé. Nous avons vu un changement chez Rith qui se sent désormais heureux. Il s'est engagé à poursuivre sa scolarité et à rester loin des drogues, et nous pensons quqe cela continuera tant qu'il se sentira en sécurité chez lui. »

« Je m'appelle Lyheng, j'ai 15 ans et mes deux parents sont ouvriers. Je suis en 3e à l'école de rattrapage de PSE, mais j'ai été pris en charge dans le programme Entre-Deux car j'ai voulu quitter l'école » explique calmement le jeune garçon. « Je ne voulais plus étudier car de mauvaises fréquentations m'encourageaient à ne plus aller à l'école. A ce moment-là, je ne pensais qu'à m'amuser. Je ne pensais plus à mon avenir et j'ai ignoré toutes les paroles de ma mère. Si je suis retourné à l'école c'est parce que j'ai constaté que sans éducation on ne peut pas sortir de la misère, l'école offre beaucoup d'opportunités ! Quand j'ai rejoint le programme Entre-Deux, on s'est bien occupé de moi et on m'a donné de bons conseils. Je sais maintenant que je veux aller étudier à l'école de gestion et vente de PSE, avant de rejoindre une bonne entreprise. Si je réalise mon rêve, j'aiderai en premier mes parents » conclut Lyheng. 

Un travail particulièrement épanouissant

« Travailler à PSE est extrêmement épanouissant et motivant car nous travaillons pour donner le sourire aux enfants » explique joyeusement Fernando. « Lorsque j'arrive le matin, je veux être l plus efficace possible pour aider les enfants à retourner à l'école en répondant à leur besoin d'amour et d'attention. Ils méritent d'avoir un personnel qui leur est entièrement dévoué. PSE est également un lieu de travail extraordinaire parce que nous travaillons au sein de l'école et que nous pouvons voir les sourires des enfants tous les jours. J'ai beaucoup de chance de faire partie de l'équipe de PSE ! »

« Pour moi, PSE est synonyme d'espoir » ajoute-t-il. « L'espoir d'un avenir meilleur, l'espoir de devenir une meilleure version de soi-même. Et c'est aussi une chance de trouver une passion en sortant de la misère ! » conclut Fernando.